lundi, novembre 12, 2007

Arthrose

Tais-toi.
Ô ma colère.

Tais-toi.

Je ne veux plus
hurler.
Je ne veux plus
avoir peur.

Tais-toi.

Je t'ai trouvée,
je sais, enfin,
qui tu es.

Tu es arrivée quand il est parti.
Tu as grandi de son absence.
De son mépris.

Tais-toi.

Tu es là.
Je le sais.
Depuis qu'il ne m'aime pas.
Depuis qu'il ne veut plus
rien savoir
de moi.

Tais-toi.
Mais tais-toi donc !

Ne vois-tu pas
que tu me tues ?

Je ne veux plus
avoir besoin de toi,
avoir besoin de lui.

Tais-toi.
Tais-toi.

Papa.

Tu n'es plus
pour moi
qu'une colère.

mercredi, novembre 07, 2007

Le balayeur et la petite feuille

Ce matin je suis passée devant un monsieur à la barbe poivre et sel, la petite cinquantaine, qui balayait le trottoir où je marchais.

En lui disant bonjour, je me suis demandée à quoi il pouvait bien penser, en balayant les feuilles.
Je me suis demandée s'il révait à des vacances au soleil, à une nouvelle voiture, au match de foot à venir, à sa famille.
Je me disais qu'il ne devait pas gagner beaucoup, que ça ne devait pas être facile pour lui.
Je me disais que ce boulot devait être pénible, surtout l'hiver.

Il devait penser à tout ça, oui.
Et je me suis retournée pour mieux voir son visage,
forcément perdu dans des désirs d'ailleurs.

Le monsieur s'est penché, il a gratté de l'ongle une petite feuille qui s'accrochait au goudron humide, puis s'est relevé et l'a balayé avec précision.
Il avançait vite, concentré dans son geste.

Il rêvait sûrement d'ailleurs, mais il était là.
Complètement là.

mardi, novembre 06, 2007

Si

Si comme moi vous allez parfois au boulot,
la boule là,
si comme moi vous vous demandez souvent ce que vous faites là,
derrière ce bureau,
si comme moi vous vous voyez des fois
comme un imposteur,
si comme moi vous vous sentez coupable de ne pas être
assez bon,
assez efficace,
si comme moi vous avez été élevé en bon petit soldat, dans la valeur
travail,
si comme moi vous aimez votre boulot, malgré tout,
à cause des gens,
surtout,

et qu'en plus vous en avez un peu marre du cinéma revendicatif mais simplificateur et bâclé,
ou simplement
si vous vivez dans un pays gris, en novembre,

allez voir, de toute urgence, le film de Jean-Michel Carré :
J'ai (très) mal au travail.

Et faites passer !